Projet de loi
Collectif pour que vivent nos langues
Projet de loi confortant les principes républicains :
Ce projet de loi, initialement destiné à lutter contre le séparatisme islamiste, suscite de nombreuses craintes parmi la population française, tous horizons confondus.
Les religions ont exprimé leur défiance envers ce texte, les défenseurs de l’instruction à la maison craignent pour l’avenir de la pratique et les avocats des langues et cultures régionales se font du souci à la lecture des articles de ce projet de loi qui fut adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 16 février 2021.
Un député Corse s’est fait le relais des inquiétudes que nourrissent les défenseurs des peuples minoritaires composant la France.
Paul-André Colombani a pointé du doigt plusieurs dispositions qui doivent attirer notre vigilance.
En premier lieu, c’est la terminologie utilisée qui doit nous interpeller. Le terme << séparatisme >> comporte une acception floue et apparaît comme un mot-valise porteur d’une insécurité juridique. Ce mot infuse l’ensemble du projet de loi et est cité dès l’exposé des motifs. Qui est concerné par ce terme ? Potentiellement, tous les avocats de l'émancipation des peuples qui font la France.
A l’appui de cette crainte, Paul-André Colombani cite un précédent historique, illustratif du dévoiement que connaissent certaines dispositions juridiques. N'a-t-on pas, lors de l’inscription du français comme langue officielle de la République à l’article 2 de la Constitution, juré aux partisans des langues régionales qu’ils n’avaient rien à craindre, cette disposition ayant seulement été créée pour bouter l’anglais hors de France ?
A l’usage, il s’est avéré qu’il s’agissait d’une arme contre nos langues, justifiant même, entre autres blocages, le refus par la France de ratifier la Charte européenne des langues régionales et minoritaires.
Dès lors, les craintes d’être taxé de << séparatisme >> apparaissent justifiées pour quiconque se réclamant d’une conception moins monolithique de la République, en somme pour une conception de celle-ci intégrant la reconnaissance de l’existence des différents peuples qui la constituent.
L’article 6 du projet de loi est un autre motif d’inquiétude. Cet article cristallise les craintes du député et de certaines associations, notamment corses, qui jugent que la rédaction volontairement large du texte pourrait servir de fondement légal au refus de subventions accordées à des structures qui soutiennent les revendications culturelles et/ou politiques des peuples minoritaires de France. Les associations seraient tenues, si le texte était voté en l’état, de signer un contrat d’engagement républicain, condition pour recevoir des subventions publiques. Ce contrat d’engagement républicain veille à garantir le respect par l’association attributaire de subventions des principes de liberté, d’égalité, de sauvegarde de l’ordre public. Ce sont des principes rassembleurs auxquels chacun souscrit, mais quid de l’application du principe d’égalité aux langues régionales ? L’égalité peut parfois servir à fonder des discriminations et donc à prohiber l’emploi, l’usage de nos langues régionales.
D’autres dispositions font actuellement débat, mais il en est une qu’il faut également relever ici. Il s’agit de la possibilité de dissoudre des associations. Ce recours à la dissolution d’associations serait rendu plus facile par l’adoption du projet de loi. Avant, la dissolution était conditionnée à l’existence de << manifestations armées dans la rue >> alors que désormais, des << agissements violents contre les personnes et les biens >> suffiront pour recourir à de telles dissolutions.
Ces agissements sont par essence condamnables et à proscrire, mais ce durcissement de la répression et l’extension infinie du champ de ce projet de loi illustrent bien le malaise de la République qui, vacillant sur ses fondements à cause de dérives islamistes que chacun doit combattre, attaque en réalité tous les éléments qui la constituent et pourraient la renforcer si elle leur reconnaissait le droit à une existence épanouie.
Jean Faivre